Selon un communiqué conjoint publié le 16 octobre 2023 par les trois grandes familles du secteur, à savoir les assureurs, les mutuelles et les institutions de prévoyance, les prestations de santé versées à leurs assurés ont augmenté de plus de 4 % au 1er semestre 2023. Ces organismes prévoient que les remboursements de santé vont s’accélérer en 2024, entraînant ainsi 1,5 milliard d’euros de dépenses supplémentaires à financer.
Des augmentations très importantes
Certains acteurs du marché anticipent des progressions encore plus élevées, avec des hausses de remboursements estimées à environ 7 % en 2023. Traditionnellement habituées à des hausses de tarifs de 2 à 3 % par an, les complémentaires santé ont connu des augmentations bien plus conséquentes en 2022, s’élevant à près de 5 à 6 %, et 2023 s’annonce encore plus préoccupante, avec une hausse avoisinant les 7 %. Dans l’ensemble, on estime que ces organismes devront faire face à près de 20 % de dépenses en plus sur une période de trois ans jusqu’en 2024, une situation sans précédent.
Pour répondre à ces nouvelles dépenses, les complémentaires santé prévoient d’augmenter considérablement leurs cotisations en 2024. Selon les estimations d’Addactis, un spécialiste du secteur, les hausses devraient osciller entre 9 et 11 % pour les complémentaires santé souscrites individuellement, et de 8 à 12,5 % pour les contrats collectifs, qui sont souscrits par les entreprises pour leurs employés.
Les complémentaires santé attribuent en partie cette hausse des dépenses à la tendance générale qui touche également l’Assurance maladie. Toutefois, elles pointent également du doigt un transfert de charges provenant de l’Assurance maladie, notamment en raison de la réforme du 100 % Santé, qui permet un remboursement intégral sur des dispositifs médicaux. Cette réforme a accru la part de responsabilité des complémentaires santé dans la prise en charge des dépenses en optique, dentaire et audiologie.
Depuis le 15 octobre, l’Assurance maladie ne rembourse plus que 60 % des soins dentaires, au lieu de 70 % précédemment, laissant ainsi les complémentaires prendre en charge la part restante. Les complémentaires santé sont disposées à prendre en charge une part plus importante des dépenses de santé, mais elles souhaitent également avoir leur mot à dire sur la gestion du système.
La Mutualité française, qui représente les acteurs mutualistes du secteur, réclame une réforme structurelle du système de santé et de son financement. Elle souhaite une approche globale, refusant d’examiner la répartition des financements entre l’Assurance maladie et les complémentaires santé profession par profession.
Cependant, pour Thomas Fatôme, directeur général de l’Assurance maladie, il n’y a pas de transfert massif de charges de l’Assurance maladie vers les complémentaires santé. Il souligne que les augmentations de tarifs annoncées par les complémentaires ne reflètent pas nécessairement un équilibre entre les hausses et les baisses. Par exemple, en remboursant à 100 % les médicaments innovants, l’Assurance maladie a renforcé ses remboursements de médicaments, augmentant ainsi le taux de remboursement de 1,7 point à 88,5 % en cinq ans.
Actuellement, les statistiques officielles ne permettent pas de déterminer si les complémentaires sont davantage ou moins sollicitées dans le financement des dépenses de santé. En 2022, les complémentaires prenaient en charge 12,6 % des dépenses de santé des Français, contre environ 80 % pour l’Assurance maladie, avec un reste à charge de 7,2 % pour les patients, selon les chiffres du ministère de la Santé.
La hausse des tarifs des mutuelles en 2024 s’inscrit dans un contexte de débats et d’inquiétudes concernant l’équilibre des responsabilités financières entre les acteurs de la santé en France, que ce soit l’Assurance maladie, les complémentaires santé, ou les patients eux-mêmes. Les assurés devront donc s’attendre à des ajustements tarifaires substantiels dans les années à venir. Ou rechercher une mutuelle à la carte pour faire des économies.